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Lectura
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Lazarillo y el ciego (continuación) |
Lazarille et l'aveugle (suite) |
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II |
II |
1 |
Estábamos en Escalona, en un mesón (1) ; dióme mi amo
un pedazo de longaniza para que la asase. |
Nous étions à Escalona, dans une auberge; mon maître
me donna un morceau de saucisse pour la griller (pour que je la
grillasse). |
2 |
Ya que la longaniza hubo pringado y se hubo el ciego
comido las pringadas (2), sacó un maravedí (3) de la bolsa y me mandó
que fuese por vino a la taberna. |
Une fois que la saucisse fût dégraissée et que
l'aveugle eût mangé les rôties, celui-ci sortit un maravédis de sa bourse
et me commanda d'aller chercher (que j'allasse) du vin à la taverne.
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3 |
Púsome el demonio la tentación delante de los ojos, —
la cual como suelen decir, hace al ladrón, |
Le diable plaça devant mes yeux la tentation,
laquelle, dit-on, fait le larron; |
4 |
y fué que había cerca del fuego un nabo pequeño,
larguillo y ruinoso, y tal que por no servir para la olla, debió ser
echado allí. |
c'est qu'il y avait près du feu un navet tout petit,
allongé et minable, à tel point que, ne pouvant servir (pour ne pas
servir) pour le pot-au-feu, il avait dû être jeté là. |
5 |
Y como al presente nadie estuviese sino él y yo solos
(4), y como me vi con apetito goloso por el sabroso olor de la longaniza
del cual solamente había de gozar, |
Comme pour l'instant il n'y avait là personne que lui
et moi (tout seuls) et comme je me sentais un appétit dévorant par suite
de la savoureuse odeur de la saucisse (la seule chose dont je devais
profiter) dont il faudrait que je me contente, |
6 |
no mirando qué me podría suceder y pospuesto todo
temor, |
sans considérer ce qui pourrait m'arriver et rejetant
toute crainte (toute crainte écartée), |
7 |
en tanto que el ciego sacaba de la bolsa el dinero, |
tandis que l'aveugle sortait la monnaie de la bourse,
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8 |
saqué la longaniza y muy presto metí el sobredicho
nabo en el asador; |
j'enlevai la saucisse et très prestement je mis le
susdit navet à la broche. |
9 |
mi amo en dándome el dinero para el vino tomó el
asador y le comenzó a dar vueltas al fuego queriendo asar al que por sus
deméritos había escapado de ser cocido (5). |
Mon maître, après m'avoir donné l'argent pour le vin
prit la broche et commença à la tourner au feu, prétendant griller celui
qui pour sa mauvaise mine avait échappé au pot-au-feu (d'être bouilli). |
10 |
Yo fui por el vino, y de camino no
tardé en despachar la longaniza. |
Je partis chercher le vin, et chemin faisant je ne
tardai pas à expédier la saucisse. |
11 |
Cuando vine, hallé al pecador del ciego que tenía
entre dos rebanadas apretado el nabo, al cual aun no había conocido. |
Quand je revins, je trouvai mon pauvre aveugle qui
tenait bien serré entre deux tranches de pain le navet qu'il n'avait pas
encore reconnu. |
12 |
Como tomase las rebanadas y mordiese en ellas
pensando también llevar parte de la longaniza, hallóse en frío con el
frío nabo (6). Alteróse y dijo : |
Comme il prenait les tranches et qu'il y mordait,
comptant emporter aussi un morceau de saucisse, il demeura interdit au
contact du froid navet. Il se fâcha et dit : |
13 |
¿Qué es esto, Lazarillo? |
Que signifie (qu'est) ceci, Lazarille? |
14 |
¡Lacerado de mí! (7) dije yo. ¿Si querréis (8) a mí
echar algo (9) ? |
Pauvre de moi ! m'écriai-je. Auriez-vous par hasard à
(voudrez-vous) me reprocher quelque chose? |
15 |
¿Yo no vengo de traer el vino? Alguno estaba allí y
por burlar haría esto. |
Est-ce que moi je ne reviens pas de vous apporter le
vin? Quelqu'un était là et pour plaisanter il a dû faire ceci. |
16 |
No, no, dijo él, que yo no he dejado el asador de la
mano; no es posible. |
Non, non, dit-il, car moi je n'ai pas lâché la broche
(de la main), ce n'est pas possible. |
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(A suivre.) |
NOTES. |
(1) Mesón équivalent de venta, auberge de campagne. |
(2) Pringar, juter. Las pringadas, tartines de pain
imprégnées de graisse. |
(3) Maravedí, ancienne monnaie espagnole qui valait
environ un centime et demi. Pluriel : maravedís et maravedises. |
(4) Como nadie estuviese allí, l'ancienne langue
mettait le subjonctif après como (comme) lorsque cette conjonction
marquait non seulement la circonstance, mais la cause. |
(5) Había escapado de ser cocido, s'était libéré
d'être bouilli, avait échappé au pot-au-feu. |
(6) Hallarse en frio ou hallarse frío, se trouver
attrapé; comparez avec le français : recevoir une douche froide. |
(7) ¡Lacerado de
mí!
on dirait aujourd'hui :
¡desdichado ou pobre de mí!
, pauvre de moi! |
(8) ¿Si querréis?... Ce si au début d'une
interrogation est encore employé de nos jours avec le sens : est-ce que
par hasard?... |
(9) Echar algo = echar la culpa de algo,
littéralement : me jeter la faute de quelque chose, me reprocher quelque
chose. |