007 Livre
Charles Baudelaire
Les Fleurs du Mal
1868
SPLEEN ET IDÉAL
XLVIII

HARMONIE DU SOIR

Voici venir les temps où vibrant sur sa tige
Chaque fleur s’évapore ainsi qu’un encensoir ;
Les sons et les parfums tournent dans l’air du soir ;
Valse mélancolique et langoureux vertige !

Chaque fleur s’évapore ainsi qu’un encensoir ;
Le violon frémit comme un cœur qu’on afflige ;
Valse mélancolique et langoureux vertige !
Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir.

Le violon frémit comme un cœur qu’on afflige,
Un cœur tendre, qui hait le néant vaste et noir !
Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir ;
Le soleil s’est noyé dans son sang qui se fige…

Un cœur tendre, qui hait le néant vaste et noir,
Du passé lumineux recueille tout vestige !
Le soleil s’est noyé dans son sang qui se fige…
Ton souvenir en moi luit comme un ostensoir !
 
Harmonie du soir

Voici venir les temps où vibrant sur sa tige
Chaque fleur s’évapore ainsi qu’un encensoir ;
Les sons et les parfums tournent dans l’air du soir ;
Valse mélancolique et langoureux vertige !

Chaque fleur s’évapore ainsi qu’un encensoir ;
Le violon frémit comme un coeur qu’on afflige ;
Valse mélancolique et langoureux vertige !
Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir.

Le violon frémit comme un coeur qu’on afflige,
Un coeur tendre, qui hait le néant vaste et noir !
Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir ;
Le soleil s’est noyé dans son sang qui se fige.

Un coeur tendre, qui hait le néant vaste et noir,
Du passé lumineux recueille tout vestige !
Le soleil s’est noyé dans son sang qui se fige...
Ton souvenir en moi luit comme un ostensoir !





Evening Harmony

The season is at hand when swaying on its stem
Every flower exhales perfume like a censer ;
Sounds and perfumes turn in the evening air ;
Melancholy waltz and languid vertigo !
Every flower exhales perfume like a censer ;
The violin quivers like a tormented heart ;
Melancholy waltz and languid vertigo !
The sky is sad and beautiful like an immense altar.
The violin quivers like a tormented heart,
A tender heart, that hates the vast, black void !
The sky is sad and beautiful like an immense altar ;
The sun has drowned in his blood which congeals...
A tender heart that hates the vast, black void
Gathers up every shred of the luminous past !
The sun has drowned in his blood which congeals...
Your memory in me glitters like a monstrance !
– William Aggeler, 1954



Evening Harmony

Now comes the eve, when on its stem vibrates
Each flower, evaporating like a censer ;
When sounds and scents in the dark air grow denser ;
Drowsed swoon through which a mournful waltz pulsates !
Each flower evaporates as from a censer ;
The fiddle like a hurt heart palpitates ;
Drowsed swoon through which a mournful waltz pulsates ;
The sad, grand sky grows, altar-like, immenser.
The fiddle, like a hurt heart, palpitates,
A heart that hates oblivion, ruthless censor.
The sad, grand sky grows, altar-like, immenser.
The sun in its own blood coagulates...
A heart that hates oblivion, ruthless censor,
The whole of the bright past resuscitates.
The sun in its own blood coagulates...
And, monstrance-like, your memory flames intenser !
– Roy Campbell, 1952
 
Charles Baudelaire
Les Fleurs du Mal